Les orientations scientifiques

Notre unité de recherche universitaire a pour thème l’Évolution et la santé orale (EvolSan) et couvre l’ensemble de la chaîne thématique :

Médecine Évolutive > Médecine orale & traitements hybrides > Analyse des pratiques > Médecine Personnalisée

Les pathologies bucco-dentaires

Les pathologies bucco-dentaires se regroupent en plusieur groupes de pathologies en fonction des tissus affectés.
Premièrement, les pathologies des tissus dentaires, comme la pathologie carieuse, sont dues à l’attaque de l’émail et de la dentine par les sécrétions acides des bactéries de la flore buccale (Streptococcus mutans).
Deuxièmement, les pathologies parodontales, pathologies des tissus de soutien de la dent (os alvéolaire, cément, desmodonte et gencive), regroupent les gingivites (touchant exclusivement la gencive) et les parodontites (touchant l’ensemble du parodonte). Troisièmement, toutes les pathologies d’ordre buccal, propres à la muqueuse telles les ulcérations, allant de l’aphte au carcinome épidermoïde. Il est aujourd’hui admis que les pathologies bucco-dentaires et surtout les pathologies touchant les tissus dentaires et parodontaux, sont des pathologies multifactorielles basées sur des facteurs principaux (facteur bactérien, alimentaire, flux salivaire) et des facteurs dits secondaires (moyens financiers, éducation, comportements, connaissances, classes sociales…). En somme, les pathologies bucco-dentaires se situent au carrefour des éléments génétiques et environnementaux. Parmi les douleurs oro-faciales, nous nous intéressons particulièrement aux désordres temporo-mandibulaires (DTM). Ces affections sont caractérisées par des douleurs chroniques ressenties au niveau du visage, de la tête, du cou et qui peuvent engager des troubles comportementaux de la mâchoire. Ces pathologies représentent un véritable problème de santé publique : d’une part, l’errance thérapeutique a été évaluée à 5 ans en moyenne pour un patient présentant un DTM ; d’autre part, le modèle étiopathogénique est encore mal défini, faisait intervenir de multiples paramètres dont la corrélation est encore mal comprise (facteurs occlusaux, musculaires, articulaires, neurologiques, psychologiques, génétiques, etc.). Il paraît donc indispensable de développer de nombreuses études tant quantitatives que qualitatives concernant ces pathologies multifactorielles dont le principal motif de consultation est la douleur. Cette dernière doit donc s’inscrire à travers des recherches pertinentes, tant dans les sciences biologiques, que dans les sciences humaines et sociales afin de développer un modèle bio-psycho-social et s’inscrire pleinement dans une médecine 4P (prédiction, prévention, personnalisation et participation) pour la prise en charge future des DTM.

A l’instar des autres maladies de civilisation (obésité, diabète, cancer, etc.), les politiques de santé publique et les thérapeutiques des professionnels de santé ciblent les facteurs comportementaux, tels que l’alimentation ou les pratiques d’hygiène. Mais singulièrement et à la différence des autres champs médicaux, l’explosion de la génomique et de la médecine personnalisée semble moins bouleverser les pratiques thérapeutiques autour de la sphère bucco-dentaire.

Une approche évolutive

Nous avons décidé d’aborder la santé orale par une approche intégrative des pathologies qui considère que les pathologies ne doivent pas être étudiées uniquement en fonction de leurs facteurs déclenchants (par exemple pour la carie, les bactéries) mais qu’elles sont aussi la résultante d’une « mal-adaptation » à un environnement donné et que l’on doit tenir compte à ce titre du contexte évolutif. Par exemple, l’état physiologique et biochimique, ou le mode de vie sont des paramètres importants qui sont de plus en plus étudiés mais ces paramètres aussi sont directement liés au pool génétique des individus qui sont eux-mêmes dépendants des différentes migrations et adaptations de notre espèce (homo sapiens) et bien entendu des phénomènes de macro évolution en amont. Nos études intègrent donc plusieurs échelles et profondeurs évolutives qui seront indispensables à la compréhension et au traitement des pathologies et à terme permettront d’envisager une médecine personnalisée. Cette approche a déjà été utilisée par les chercheurs de l’ancienne équipe de médecine évolutive (UMR 5288) notamment sur les pathologies du métabolisme mitochondrial. Ces travaux ont donné lieu à plusieurs publications à fort coefficient d’impact comme Nature, PNAS, Nature communication.

échelle étude médecine évolutive
échelle étude médecine évolutive

Notre étude s’intéresse aussi aux conséquences de ces traitements au niveau physiologique mais aussi au niveau évolutif en accordant une part importante aux conséquences psychologiques et socioculturelles par une approche d’analyses des pratiques fondée ou basée sur les sciences humaines et sociales (socio-anthropologie, sciences de l’éducation, sciences cognitives).



approche science humaine
approche science humaine

Une approche clinique vers le patient

L’unité de recherche, située dans les locaux de la faculté de chirurgie dentaire de Toulouse, se situe à proximité du centre de soins d’odontologie et de médecine bucco-dentaire (service hospitalier attenant aux locaux de la faculté). Le patient est donc au cœur d’une approche de recherche qui favorise une meilleure interaction des membres de l’équipe qu’ils soient chercheurs ou cliniciens. Ces derniers se regroupent au niveau hospitalier au sein de l’équipe de prothèse maxillo-faciale et de rééducation de l’appareil manducateur. L’équipe de prothèse maxillo-faciale occupe une place majeure en France et en Europe de par le nombre de prothèses faciales réalisées et en termes de publications scientifiques dans ce domaine (plus d’une centaine). Depuis 2016, l’unité de soins offre également une consultation spécialisée dans la prise en charge des douleurs oro-faciales chroniques et assure, autour de ce motif de consultation, l’interaction entre de nombreux personnels de santé : médecins, chirurgiens-dentistes, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, psychologues. Cette inter-disciplinarité sur le plan clinique est propice à une approche globale et personnalisée du patient et en la pratique d’une médecine intégrative. Cette dernière favorise l’émergence de nouvelles problématiques de recherche au carrefour des sciences dures et des sciences humaines et sociales.

Une approche éthique

Un engagement fort de l’unité est de développer et valoriser une approche éthique. Cette vision apparaît incontournable pour concrétiser la place aujourd’hui reconnue des Sciences Humaines et Sociales dans les cursus universitaires, comme l’affirmait le dossier de presse du ministère du 4 juillet 2016, intitulé « les Sciences Humaines et Sociales, un investissement pour l’avenir », et plus particulièrement sans doute dans une filière de santé. L’intention est de s’appuyer sur deux concepts fondamentaux en réflexion éthique : pluridisciplinarité et transdisciplinarité. Pluridisciplinarité car une telle réflexion s’enrichit d’autres disciplines : la sociologie, l’ethnologie, l’anthropologie par exemple qui nous permettent de comprendre nos sociétés pluriculturelles ; et transdisciplinarité car la réflexion concerne l’ensemble des disciplines enseignées en médecine bucco-dentaire en particulier et dans toutes les disciplines médicales en général. La finalité est de promouvoir une éthique de responsabilité, en la distinguant franchement de l’éthique de conviction, parfaitement audible par ailleurs, représentant en général le résultat de réflexions spirituelles, mais alors éloignées du fruit de recherches. L’éthique de responsabilité, basée sur de la recherche, correspond bien à une discipline universitaire au sens où la recherche nourrit l’enseignement. Pour ce qui nous concerne, les solutions trouvées sont fondées sur des études de terrain conduites selon les méthodes des sciences humaines.